Akai ito
livre 1
Chapitre 31
- Tu as une sacrée force pour ta taille, s'étonna Yamamoto.
Megumi posa une caisse devant le comptoir en se retenant tant bien que mal de pousser un cri de douleur.
Elle avait le dos en compote...
Durant toute la matinée, elle n'avait fait que porter des charges bien trop lourdes pour elle, en se faisant violence pour cacher ses difficultés.
Elle avait bien compris que dans ce monde, le travail était pour les hommes, il lui fallait donc redoubler d'efforts pour faire ses preuves.
- Ha ha, merci, Monsieur ! Dit-elle en s'efforçant de sourire. J'ai toujours été plus forte que la moyenne...
- C'est parfait, je m’inquiétais un peu au début, mais finalement, tu vas m'être très utile !
Il sortit une petite montre de sa poche et hocha la tête en la rangeant.
- Bien, à cette heure-ci, peu de clients viennent, je vais en profiter pour t'apprendre à préparer les feuilles de typhole.
Il s'agissait de feuilles de thé flétries, puis séchées.
Megumi le regarda faire avec curiosité tandis qu'il mixait les feuilles avec des gestes précis et maîtrisés.
Le patron semblait vieux et affaibli, mais face à son ouvrage, Megumi le voyait avec trente ans de moins. Il était si vigoureux et passionné.
- Les clients consomment le typhole souvent après avoir bu trop d'alcool, expliqua-t-il sans lâcher sa tâche des yeux. Mais en vérité, il possède de nombreuses vertus. Comme celle d'aider à garder les dents blanches.
Il lui fit un sourire éclatant pour illustrer son explication et Megumi rit en découvrant une rangée de dents parfaitement blanches.
Il semblait si vieux qu'avec des dents pareilles, il donnait l'impression de s'être fait poser des facettes dentaires.
- Et personne ne le sait ?
- Non, les clients viennent surtout pour acheter des fleurs et des feuilles de Ooloirs. Ah d'ailleurs, celles-ci sont un peu plus complexes à préparer car elles demandent une fermentation partielle des feuilles. Je te montrerai demain, car il commence déjà à se faire tard.
Effectivement, la matinée touchait à sa fin. Elle ne l'avait pas vu passer, mais elle n'était pas mécontente de la voir se terminer. Elle ne sentait presque plus ses membres...
Megumi pensa à son premier cours de combat qui l'attendait, et elle se sentit soudain bien moins motivée que la veille.
Elle ne voulait à présent faire qu'une seule chose : dormir !
« Et si je demandais à Kyosuke de reporter à demain ? »
« Non ! Tu en as besoin ! Tu ne vas pas dépendre d'eux éternellement ! Il faut que tu apprennes à te défendre par toi-même ! » lui rappela la voix de la raison.
- Bien ! Ça sera tout pour aujourd'hui, merci pour ton aide. Je t'attends demain, à la même heure.
- Je serai à l'heure, Monsieur, dit-elle en s'inclinant. Merci encore pour tout !
En se redressant, elle retint une grimace de douleur et sortit en s'efforçant de sourire pour cacher à quel point cette matinée l'avait épuisée.
Elle referma la porte derrière elle en balayant l'allée des yeux, mais alors qu'elle s'attendait à trouver Kenji... Elle croisa le regard d'Hayate qui était paresseusement appuyé contre un puits, tandis qu'une femme aux longs cheveux sombres lui parlait en basculant d'un pied à l'autre, l’air intimidé.
Megumi se figea sur place et regarda autour d'elle d'un air perdu, le cœur sur le point d'éclater.
Que faisait-il là ?!
N'était-ce pas à Kenji de venir ?
La jeune femme était prise de court. Elle dut se concentrer de toutes ses forces pour cacher à quel point elle était chamboulée.
Elle ne s'attendait tellement pas à le voir...
Et encore moins avec une femme !
Hayate lui fit son habituel sourire taquin et se détacha du puits avant de s'avancer vers Megumi, sans se donner la peine de prendre correctement congé de la jeune femme qui le suivait des yeux d'un air surpris et blessé.
Megumi fronça des yeux et sentit un malaise la saisir en croisant le regard haineux de la jeune femme.
Elle avait reconnu d'emblée cette brûlure dans ses yeux...
Une brûlure similaire à la sienne.
Et Megumi comprit qu'Hayate les avait toutes les deux blessées de la même manière.
Elle chassa la vision de leurs deux corps nus enlacés, en réprimant un frisson de jalousie, et se maudit en sentant son mal-être s'intensifier.
Ce sentiment qu'elle tentait de refouler était comme un poison. Il rongeait son être, peu à peu...
« Que m'arrivera-t-il lorsqu'il aura tout dévoré ? Que me restera-t-il ? Deviendrai-je une autre personne ? »
Elle déglutit difficilement en levant les yeux vers le capitaine qui s'avançait vers elle avec l'aisance d'un prince démoniaque.
Toujours avec ce même air supérieur comme si le sol qu'il foulait lui appartenait...
Comme si tout ce qu'il regardait lui appartenait...
Elle détourna le regard, incapable de le regarder dans les yeux une seconde de plus.
- Alors, Megu chan ? Cette première journée ? S'enquit-il avec légèreté.
Megumi jeta un regard en coin vers la jeune femme qui s'éloignait en fixant le sol d'un air abattu, puis, elle leva des yeux froids vers Hayate.
- Je pensais trouver Kenji...
- Ah ? Kenji entraîne les soldats ce matin, s'amusa-t-il avant d'ajouter d'une voix suave et taquine : Pourquoi ? Tu n'es pas heureuse de me voir ?
« Pas à moi... » semblait dire son regard.
Megumi évita de regarder ses yeux arrogants et détourna le visage d'un air agacé.
- J'aurais préféré faire la route avec Kenji, mais je n'ai pas le choix, visiblement...
Elle commença à s'avancer en direction de l'avant-poste, en veillant à laisser une distance de sécurité entre eux.
Le simple fait de sentir son odeur éveillait en elle un besoin charnel honteux et inavouable. Elle aurait voulu pleurer de rage et de honte.
Elle ne supportait plus cette humiliation que lui faisait endurer son propre corps...
Elle devait s'en débarrasser au plus vite !
Megumi devait se libérer de l'emprise qu'il avait sur elle, afin d'y voir un peu plus clair concernant ses sentiments envers Eisuke.
Elle savait au fond d'elle-même que le vice-commandant incarnait tout ce dont elle avait toujours rêvé, mais ses sentiments pour Hayate chamboulaient tout.
Elle devait s'en défaire...
- Ne vas-tu donc pas me raconter ta matinée, Megu chan ? Rit-il malicieusement.
Sa voix diaboliquement sexy lui donna un frisson.
- Pourquoi fais-tu semblant de t'y intéresser ? Marmonna-t-elle entre ses dents.
- Ah ? Tu me blesses, Megu chan... s'amusa-t-il en portant la main à son cœur. Bien sûr, que ça m'intéresse. Raconte-moi.
Il nicha sa main droite dans la manche de sa main gauche dans une posture détendue, et Megumi lui jeta un bref regard gêné.
Elle se sentait rougir, c'était insupportable...
- Ça s'est très bien passé. Je reviens demain... marmonna-t-elle.
Megumi leva les yeux vers le chemin et son cœur s'emballa soudain en réalisant qu'ils allaient bientôt devoir passer par les bois pour rentrer.
Elle avait presque oublié ce détail...
« Oh mon Dieu, nous allons nous retrouver... totalement seuls ! Et cachés par les arbres ! »
Son cœur battait à se rompre.
Allait-il tenter quelque chose ?
Megumi ne voulait plus jamais le laisser la toucher, mais… C’était également le cas la fois précédente, et il était pourtant parvenu à ses fins !
Elle était totalement paniquée à l’idée de perdre une nouvelle fois le contrôle de son corps.
« Tu dis non et tu le repousses ! Ce n’est pas compliqué ! » se fâcha sa raison.
« Oui, mais… ce n’est pas aussi facile, en réalité... »
À chaque fois qu'Hayate avait posé la main sur elle, c'était comme si elle était soudainement devenue quelqu'un d'autre, et elle refusait de voir cet étrange phénomène se reproduire.
- Hayate, dit-elle soudain déterminée, en cessant net le pas. Je... Me raccompagner est ridicule ! Je connais le chemin !
Hayate s'arrêta et se tourna vers elle d'un air interrogateur.
- Et puis... tu as laissé tes hommes patrouiller sans toi, non ? Tu devrais aller les rejoindre, je peux rentrer seule...
Il la dévisagea pendant un instant sans rien dire, puis il jeta un œil vers les premiers arbres. Et lorsqu'il posa sur Megumi son incroyable regard sexy, malicieux et cruel, en inclinant la tête sur le côté, elle sentit son cœur imploser dans sa poitrine, et le rouge lui monter aux joues.
- Pourquoi ? Tu as peur, Megu chan ?
Megumi se raidit et se mordit l'intérieur de la joue en le fusillant du regard pour cacher à quel point il l'avait ébranlé.
Si elle s'écoutait, elle le laisserait planté là comme un chou, et partirait en courant, direction le domaine, afin de ne plus avoir à rester seule avec lui.
Mais c'était impossible.
La jeune femme redressa le dos et l'affronta du regard en tachant de rester froide, et de maîtriser sa voix.
- Je n'ai pas peur de toi, Hayate.
- Alors... Où est le problème ? Susurra-t-il sournoisement en lui faisant un élégant signe de la main pour l'encourager à reprendre la route.
Elle fronça des yeux avec méfiance et marcha en direction de la forêt en s'efforçant de garder son calme, mais elle tremblait tant qu'elle peinait à placer un pied devant l'autre.
Un silence s'installa...
Un silence si déstabilisant que Megumi en oublia de respirer.
Hayate avait un pas de retard sur elle, un mètre les séparait, pourtant, tout son être réagissait à sa présence. Au bruit de ses pas, à son odeur, à sa respiration...
Elle aimait tant son odeur qu'elle aurait voulu s'y noyer.
Cette pensée l'obsédait, alors elle songea que tout irait bien s'il restait derrière elle, durant tout le chemin.
Mais Hayate la rattrapa en une enjambée et Megumi crut défaillir en réalisant qu'ils marchaient à présent côte à côte.
Si elle tendait la main, juste un peu, elle pourrait toucher la sienne...
Elle serra le poing et le nicha contre son sac en bandoulière par précaution.
Les mains de cet homme...
Elle baissa les yeux et les regarda discrètement du coin de l'œil.
Elles n'avaient rien de spécial, alors pourquoi éveillaient-elles en elle des pensées aussi répugnantes !?
« Bon sang, pourvu qu'il ne tente rien... » espéra-t-elle en levant les yeux vers le chemin.
Elle l'espérait sincèrement car s'il l'attrapait soudainement... avec ses mains excitantes, et la soulevait pour la prendre sauvagement au milieu des bois, elle n'était pas certaine de parvenir à le repousser.
Le simple fait de l'imaginer la déshabiller à la hâte, avec la même expression ébahie que cette nuit-là, suffisait à l'enflammer.
L'excitation faisait grimper la température de son corps.
Des images brûlantes défilaient dans son esprit.
Le souvenir de cette nuit-là la rattrapait…
Et elle eut énormément de mal à respirer normalement tant son corps réclamait le sien avec force.
« Mon Dieu, mais qu'est-ce qu’il m'arrive ?! Qu'est-ce que ce chien a fait de moi ?! » s'affola-t-elle intérieurement en réalisant à quel point elle avait envie de lui.
C'était insupportable.
Comment pouvait-elle désirer à ce point la personne qu'elle haïssait plus que tout au monde ?!
Cela n'avait aucun sens...
Soudain, le visage d'Eisuke lui vint à l'esprit, et elle se sentit si coupable qu'elle en eut envie de pleurer.
« Quelle horreur... »
« Quelle horrible personne, je suis ! »
« Si c'était pour avoir ce genre de pensées, j'aurais mieux fait de mettre un frein à Eisuke directement ! »
« Depuis quand suis-je devenue une femme si légère ? »
- Tu as une drôle de façon de respirer, Megu chan... Tout va bien ? murmura soudain Hayate d'une voix malicieuse.
Megumi frissonna et se retint de regarder dans sa direction.
Il pouffa de rire.
- Ne t'inquiète pas, je ne vais pas te manger, s'amusa-t-il avant d'ajouter d'une voix taquine : J'ai un minimum de retenue.
La jeune fille haussa les sourcils et le regarda de travers d'un air blasé.
- Sans blague...
Il rit de plus belle et Megumi se sentit soudain très mal en réalisant qu'elle n'arrivait pas à détacher son regard de son visage rieur.
Il était si craquant lorsqu'il riait...
Il était craquant tout court d'ailleurs.
Tout chez lui l'attirait comme un aimant. Son charisme, sa voix, son allure, sa manière de tout prendre à la légère, son regard vert taquin...
Chaque cellule de son être le désirait à en mourir.
« Mon Dieu... se dit-elle, désespérée. Comment vais-je parvenir à me débarrasser de cette monstrueuse attirance ? »
Elle avait la conviction que ce qu'elle ressentait n'était pas normal...
C'était bien trop intense.
Bien trop puissant...
« Vais-je devoir quitter Ilias, pour m'en défaire un jour ? »
Soudain, Megumi réalisa qu'elle le dévisageait depuis un peu trop longtemps, alors elle s'empressa de détourner les yeux pour fuir ce regard arrogant et malicieux.
Il avait clairement remarqué qu'elle l'avait regardé avec insistance...
Elle avait si honte.
- Tu ne m'aides pas beaucoup là, fillette, s'amusa-t-il d'une voix suave. J'essaye de me comporter correctement, mais si tu me regardes comme ça, ça va être compliqué...
Megumi sursauta et s'empressa de placer une distance de sécurité entre eux en rougissant comme une tomate.
- Arrête de rêver ! Je ne te regardais pas ! S'exclama-t-elle.
Elle regretta aussitôt sa réaction impulsive. Elle aurait mieux fait de mimer l'indifférence. Quelle idiote !
- Ha ha ! Ne t'affole pas autant, pouffa Hayate, amusé. Moi aussi, je te regarde souvent...
Megumi se figea sur place et le regarda avec de grands yeux choqués tandis que son cœur semblait vouloir sortir de sa poitrine.
Elle ne s'attendait pas du tout à cela...
Troublée, elle détourna les yeux et accéléra le pas en fixant le sol, les joues brûlantes.
- Ha ha, ne marche pas si vite, Megu chan, s'amusa-t-il.
- Ne viens plus me chercher, Hayate ! Siffla-t-elle soudain entre ses dents pour cacher son trouble. Vraiment ! Abstiens-toi, la prochaine fois, je te le demande !
- Ah ? S'étonna-t-il en riant. Et pour quelle raison ?
- Parce que tu m'insupportes ! S'énerva-t-elle sans le regarder directement, ça fait un bon moment maintenant que je hais ta compagnie ! Et tu le sais très bien ! Alors pourquoi es-tu venu ?
Il se mit à rire de plus belle, ce qui agaça doublement Megumi.
- Je te trouve vraiment dure, Megu chan, s'amusa-t-il, ai-je eu un seul geste déplacé à ton égard, aujourd'hui ?
Elle pinça les lèvres avec lassitude...
- Je ne parle pas que d'aujourd'hui, et tu le sais ! Alors fais-moi plaisir et ne me raccompagne plus !
- Pourquoi ? Susurra-t-il malicieux en lui donnant un petit coup de coude taquin. Tu as peur de succomber ?
- Rien à voir ! Sursauta-t-elle en s'éloignant pour briser le contact.
Elle sentait qu'il jouait.
Il cherchait la complicité, mais il était hors de question pour elle d’entrer dans son jeu !
Elle n'avait aucune confiance en lui.
Et son regard taquin était bien trop dangereux pour Megumi, elle devait instaurer une distance et la garder !
- Bref, je peux rentrer seule, s'impatienta-t-elle en se tournant enfin vers lui. Nous sommes presque arrivés alors va rejoindre tes hommes !
Il s'arrêta devant elle et la dévisagea avec un sourire espiègle en inclinant la tête sur le côté.
- Je ne fais que te raccompagner, Megu chan. Pourquoi ma présence te gêne à ce point ?
Elle détestait l'entendre prononcer son nom, mais elle détestait mille fois plus l'entendre l'appeler « Megu chan ».
Ou du moins, elle détestait l'effet que cela lui faisait...
Il avait une façon de prononcer ce surnom qui le rendait plus intime, même érotique parfois.
Elle réalisa soudain qu'il était bien trop près, alors elle recula et lui lança froidement, un peu sans réfléchir :
- Je me fiche que tu sois là ou pas ! Ça n'a pas d'importance ! Mais je ne veux pas qu'Eisuke me voit revenir avec toi !
Megumi ignorait d'où cette provocation lui venait.
Elle l'avait regretté à la seconde où elle s'était entendue la prononcer.
Mais il était trop tard à présent...
Elle l'affronta du regard et s'efforça de garder un air impassible en espérant ne pas l'avoir énervé, mais il se contentait de la fixer, sans rien dire.
Son expression était si neutre qu'elle pensa même durant un instant que le capitaine ne l'avait pas écoutée. Mais au bout d'un moment, le regard d'Hayate se tordit étrangement et il leva le visage vers le ciel en éclatant de rire.
Un rire explosif, bruyant, euphorique... et incroyablement terrifiant. Elle eut presque l'impression d'entendre le rire du diable en personne, alors elle recula d'un pas hésitant en le regardant avec de grands yeux effarés.
« Qu'est-ce que... ? » s'affola-t-elle intérieurement en retenant sa respiration.
Le cœur de Megumi battait fort.
L'estomac noué, les nerfs en vrac, elle déglutit en tentant de retrouver son calme, en vain...
Elle était tétanisée en le regardant, et lorsqu'il baissa lentement la tête en la toisant du coin de l'œil d'un air cruel, elle se retint difficilement de prendre la fuite...
Son regard était si glacial qu'il dénotait complètement avec ce sourire large qui étirait toujours ses lèvres.
Il était... aussi terrifiant qu'un démon.
Megumi ne le lâcha pas du regard et se prépara mentalement à prendre ses jambes à son cou en cas de besoin.
- Qu'as-tu essayé de faire, à l'instant, Megu chan ? Murmura-t-il.
Il souriait toujours, mais ses yeux étaient si froids et durs que ses pupilles semblaient avoir rétrécies, accentuant la folie de son regard.
- Ne me dis pas que tu as cherché à me rendre jaloux ?
Elle déglutit de nouveau pour tenter de reprendre le contrôle de sa voix.
Elle ignorait pourquoi il la regardait de cette manière, mais il commençait à lui faire peur...
- Non... Je n'ai dit que la vérité, assuma-t-elle en s'efforçant d'avoir l'air neutre. Je ne veux pas qu'Eisuke se fasse des idées en nous voyant revenir ensemble... Surtout après ce que tu lui as dit !
Un silence pesant s'installa et Hayate se mit à pouffer de rire, une fois de plus, d’une manière terrifiante.
Ses yeux pénétrants la maudissaient, tandis qu'il la toisait avec un mépris moqueur.
Un véritable éclat de démence brillait dans ses yeux, et elle comprit que s'il le voulait, il pourrait lui faire beaucoup de mal...
- Eh bien, tu sais quoi, Megu chan ? On va lui donner une bonne raison de se faire des idées...
- N... Non ! Sursauta-t-elle.
Trop tard, les yeux de Megumi s'arrondirent lorsque les lèvres d'Hayate se plaquèrent violemment contre les siennes, brutales et exigeantes.
Il s'était approché avec une rapidité presque inhumaine !
Elle tenta de le repousser tandis qu'il l'écrasait contre un arbre pour bloquer ses mouvements, mais il était bien trop fort pour elle.
Et lorsque ses mains rugueuses se faufilèrent précipitamment sous sa robe pour la retrousser, un vent de panique la traversa et elle cria contre ses lèvres en martelant sa poitrine de ses poings, mais c'était comme frapper un mur de briques...
La peau de son visage était devenue brûlante, elle n'arrivait plus à respirer.
Hayate ouvrit légèrement ses yeux dominateurs en mordant sa lèvre sans douceur et Megumi crut défaillir en se perdant dans son regard brûlant et glacial à la fois. Son cœur battait à tout rompre, elle devait à tout prix se contrôler et maîtriser son excitation.
Mais lorsqu'il la souleva brusquement, une main sous chaque cuisse pour les écarter, Megumi s'oublia et ne put réprimer un gémissement libérateur lorsqu'il s'appuya contre elle avec ardeur.
Sentir sa virilité, même à travers ses vêtements, lui avait presque fait oublier qui elle était.
Elle noua ses chevilles dans son dos pour le serrer entre ses cuisses, c'était plus fort qu'elle. Elle avait l'impression que s'il ne la possédait pas dans la seconde, elle allait en mourir.
C'était un besoin puissant, vital, désespéré...
Les mains avides et brûlantes d'Hayate lui empoignèrent les fesses pour la serrer plus étroitement contre son désir, et Megumi, étourdie, répondit à son baiser avec passion, encaissant sa bouche qui écrasait la sienne sans douceur.
Elle s'accrocha à lui pour ne pas tomber, et s'enivra de son odeur comme une affamée tandis qu'ils s'embrassaient comme si la terre allait exploser d'un instant à l'autre. Elle avait l'impression de revivre à son contact.
Elle le serra contre elle, les mains se mêlant dans ses cheveux noués et Megumi aurait volontiers donné tout ce qu'elle avait pour voir le temps s'arrêter.
Soudain, le visage troublé d'Eisuke lui vint brusquement, et Megumi retrouva brutalement ses esprits.
Son corps pleurait, la suppliait d'arrêter de réfléchir tant il réclamait celui d'Hayate, mais elle devait reprendre le dessus, même si ces brûlantes pulsations entre ses cuisses lui faisaient mal tant elle avait besoin de lui.
- Non ! Stop ! Arrête ! Sursauta-t-elle soudain d'une voix enfiévrée en appuyant sa main contre la bouche d'Hayate, mettant fin à son baiser.
Sentir son corps contre le sien, et ses merveilleuses mains sur sa peau étaient une vraie torture mais elle devait cesser de laisser son corps décider pour elle.
Ils n'étaient pas des animaux !
- Arrête ! Lâche-moi, suffoqua-t-elle.
Megumi tenta de le pousser en arrière, mais, sans la lâcher de son regard dangereusement fébrile et rieur, il s'appuya de nouveau contre elle et la jeune femme crut défaillir en sentant un élan de plaisir palpiter dans la chaleur de son intimité.
- Mon Dieu, mais arrête ça ! S'affola-t-elle, le souffle coupé en tentant de le repousser.
Son regard était incroyablement diabolique et Megumi sentit la peur s'insinuer dans ses veines.
Elle se mit à gigoter dans tous les sens en grondant de colère et lorsque Hayate l'étouffa en l'écrasant contre l'arbre de tout son poids, elle lui flanqua un coup de poing à la joue et parvint à reposer ses pieds sur le sol, tant bien que mal après une bataille sans merci.
Mais lorsqu'elle tenta de prendre la fuite, la main d'Hayate se referma autour de sa gorge frêle avant de la clouer de nouveau à l'arbre.
Ses yeux verts avaient rétréci jusqu'à ne devenir que deux fentes sombres.
Sans se défaire de son sourire terrible et impitoyable, il resserra sa poigne, et Megumi eut la sensation de voir l'expression atroce et glaciale d'un serpent.
- Hayate, laisse-moi partir...
Il ne l'étranglait pas, mais sa main contre sa gorge lui faisait un tel effet qu'elle en avait le souffle coupé.
- Pourquoi me repousses-tu alors que tout ton corps me réclame ? La nargua-t-il dans un souffle.
Elle déglutit et lui répondit dans un souffle, les yeux et les joues en feu :
- Parce que je ne suis pas ton jouet, Hayate... Je me suis déjà donnée à toi, et tu m'as rejetée comme un fruit pourri. Je ne veux plus jamais te laisser l'occasion de me traiter de la sorte.
Son sourire diabolique s'élargit et il pouffa de rire.
- Et donc, parce que je ne veux pas de toi, tu te rabats maintenant sur Eisuke ? Railla-t-il d'un air moqueur. Tu n'es pas gênée toi...
Parce que je ne veux pas de toi.
Ces mots flottèrent entre eux pendant un long moment tandis que Megumi encaissait la douleur tant bien que mal.
Elle avait l'impression de sentir son cœur saigner à blanc...
La jeune femme le dévisagea, le regard lourd, et lui répondit d'une voix étrangement sereine malgré son intense envie de pleurer :
- Tu te trompes... Eisuke est bien plus que ça pour moi.
Elle aurait voulu s'arrêter là, mais il l'avait blessée...
- Il est tout ce que tu n'es pas. C'est un homme distingué, doux et gentil. Il m'a toujours respectée, même pendant qu'il m'embrassait dans l'intimité de ma chambre...
Sa main se serra légèrement autour de sa gorge mais elle continua :
- Alors tu crois peut-être que j’hésiterais entre quelqu'un comme lui et un psychopathe mal élevé tel que toi ? Détrompe-toi, le choix est vite fait. Alors au lieu de chercher à me tourmenter, tu ferais mieux de trouver un moyen pour te corriger étant donné que tes parents n'en ont pas été capables...
Megumi poussa un cri de surprise en le voyant soudain lever le poing vers elle, un éclat de folie dans le regard, et elle cessa net de respirer lorsque son coup alla s'écraser brutalement contre l'arbre, tout près de son visage.
Elle se figea sur place et retint son souffle, choquée par la violence de son geste.
Son regard dément la dévisageait comme s'il hésitait à la tuer, sa main la serrait, son sourire persistait...
Et Megumi comprit qu'elle venait de toucher un point sensible…
Elle se souvint brusquement qu'Akihoshi lui avait révélé qu'il l'avait recueilli très jeune…
« Mais que s’était-il passé avant cela ? »
Étaient-ils morts ? Avait-il été abandonné ? Elle ignorait totalement le reste de l'histoire...
Elle regretta aussitôt ses paroles et se mordit la lèvre en fermant les yeux tandis que le silence devenait de plus en plus lourd.
Elle savait qu'elle devait lui présenter ses excuses mais sa fierté l'en empêchait...
Au bout d'un long moment, Hayate rit doucement et relâcha sa gorge, avant de tourner les talons, la laissant plantée là, au milieu de la forêt, sans un mot...
Megumi sentit un goût amer s'insinuer dans sa bouche alors que la silhouette du capitaine disparaissait peu à peu.
Une petite voix lui soufflait de le rattraper, mais elle préférait s'abstenir, ils s'étaient déjà faits trop de mal.
L'un comme l'autre...